Candidat : question interdite Ă poser par un employeur ?

Un CV n’est pas un passeport pour l’intimité. Pourtant, chaque année, d’innombrables candidats se retrouvent confrontés à des questions qui n’ont rien à voir avec le poste visé : famille, santé, convictions… Même glissées subrepticement dans la conversation, ces demandes restent illégales et exposent l’employeur à des sanctions. Le Code du travail ne laisse aucune place à l’ambiguïté : protéger la vie privée et garantir l’égalité de traitement est une exigence, pas une option.
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Questions interdites en entretien : un enjeu de droits pour les candidats
Lorsqu’un candidat franchit la porte pour un entretien, chaque échange compte. Le recruteur ne peut s’aventurer que sur le terrain strictement professionnel, défini par des compétences et aptitudes concrètes, comme le rappelle sans détour le Code du travail. S’intéresser à la sphère personnelle, c’est franchir la ligne rouge de la discrimination. La législation française s’est musclée au fil du temps : orientation sexuelle, origine, opinions politiques, état de santé, appartenance syndicale… autant de sujets désormais verrouillés.
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Voici ce que la loi impose aux employeurs et aux équipes RH lors du recrutement :
- Les questions doivent viser exclusivement ce qui a un impact direct sur la capacité du candidat à occuper le poste.
- Au total, la législation interdit toute discrimination liée à au moins 19 critères, parmi lesquels l’âge, la situation familiale, l’apparence physique ou le lieu de résidence.
Impossible de se réfugier derrière l’habitude ou l’ignorance : tout dérapage peut entacher la réputation de l’entreprise. Les sociétés de plus de 300 salariés sont d’ailleurs tenues de former leurs recruteurs à la non-discrimination. Un faux pas, même minime, suffit à déclencher une contestation. Le respect du droit ne s’arrête pas à la simple conformité ; il reflète aussi un engagement réel pour l’équité et la responsabilité sociale. Être irréprochable sur ce point, c’est à la fois limiter les risques juridiques et affirmer une politique RH fondée sur l’égalité des chances.
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À quoi reconnaît-on une question illégale lors d’un recrutement ?
Le Code du travail est limpide sur ce point : toute interrogation qui touche à la vie privée sans rapport direct avec l’exigence du poste sort du cadre légal. L’article L1221-6 fixe la règle : seules les informations indispensables à l’appréciation des compétences ou aptitudes professionnelles du candidat sont tolérées. Le reste, peu importe la forme, tombe sous le coup de la loi.
Le champ d’application est vaste et ne laisse pas de place aux interprétations douteuses. Questions sur la santé, l’orientation sexuelle, les convictions religieuses, l’apparence physique, le nom ou les origines, tout y passe. L’article L1132-1 dresse une liste précise d’au moins 19 critères discriminatoires. Même une allusion à un handicap, à un projet parental ou à des engagements associatifs peut conduire l’employeur devant la justice.
Le principe est simple : si la question ne sert pas directement l’évaluation des compétences professionnelles, elle n’a pas sa place en entretien. Les RH avertis le savent : il est inutile, et risqué, de demander la religion, la situation maritale ou tout autre détail intime pour jauger les aptitudes d’un candidat.
Exemples concrets : ces questions que l’employeur n’a pas le droit de poser
En entretien, des phrases en apparence anodines peuvent coûter cher à l’entreprise. La loi ne tolère aucun écart sur les sujets liés à la vie privée. Voici les thématiques explicitement proscrites lors d’un recrutement :
- Situation familiale : demander « Êtes-vous marié ? », « Avez-vous des enfants ? » ou « Pensez-vous à avoir un enfant prochainement ? » est strictement interdit.
- Origine ou nom de famille : s’enquérir de « D’où venez-vous vraiment ? » outrepasse les limites légales.
- Opinions politiques ou convictions religieuses : toute question du type « Quelle est votre orientation politique ? », « Pratiquez-vous une religion ? » est prohibée.
- Orientation sexuelle ou identité de genre : sujets intouchables, même de façon détournée.
- État de santé, handicap ou caractéristiques génétiques : aucune question n’est admissible sur ces points.
- Apparence physique : remarques sur le poids, la taille, la couleur de peau ou tout autre aspect physique sont formellement proscrites.
- Activités syndicales ou mutualistes : là encore, la loi protège le candidat.
La discrimination à l’embauche ne laisse pas de place à l’approximation. Le processus de sélection doit s’en tenir aux compétences et à l’expérience, point final. Avec l’extension de la formation obligatoire à la non-discrimination, le cadre juridique se renforce et n’épargne plus aucune entreprise de plus de 300 salariés. Le moindre faux pas peut remettre en cause la fiabilité de toute la politique RH, et abîmer durablement la marque employeur.
Comment réagir face à une question interdite en entretien d’embauche ?
Face à une question déplacée, le trouble peut être grand. Pourtant, il existe plusieurs manières de réagir sans se mettre en difficulté. Rappelez-vous : tout ce qui concerne la santé, la vie familiale, l’orientation sexuelle ou les convictions politiques n’a rien à faire dans un entretien de recrutement. Le Code du travail protège chaque candidat et limite strictement les questions au seul champ des compétences ou aptitudes nécessaires pour le poste.
Voici différentes stratégies à mobiliser face à ce type de situation :
- Répondez avec retenue, sans dévoiler d’éléments personnels. Ramenez la discussion sur votre expérience, vos compétences et vos réalisations.
- Si le recruteur insiste, demandez posément en quoi l’information demandée est pertinente pour le poste visé. Ce rappel, loin d’être provocateur, permet de recentrer l’échange sur le professionnel.
- En cas de question manifestement illégale ou répétée, il est possible de saisir le conseil de prud’hommes. La loi prévoit des sanctions lourdes : jusqu’à 45 000 euros d’amende et trois ans d’emprisonnement pour l’employeur (article L225-2 du code pénal).
- Le médecin du travail est seul habilité à juger de l’aptitude médicale d’un candidat. Aucun recruteur n’a à s’immiscer dans ce domaine lors d’un entretien.
- En cas de préjudice, le candidat peut demander réparation et obtenir des dommages et intérêts. Cette voie reste encore sous-utilisée, alors qu’elle contribue à renforcer l’égalité des chances et la responsabilisation des employeurs.
Face à la tentation d’enfreindre la loi, la vigilance reste la meilleure alliée des candidats comme des entreprises. Car au bout du compte, chaque entretien d’embauche raconte aussi une histoire de respect, d’équité et d’avenir professionnel.