Une personne peut être refusée à l’embauche parce qu’elle porte un nom à consonance étrangère, mais aussi à cause de son engagement syndical ou de son lieu de résidence. La loi française interdit ces pratiques, pourtant elles persistent sous des formes variées et parfois méconnues.
Le Code pénal prévoit aujourd’hui 26 critères de discrimination, applicables dans la vie quotidienne, au travail ou dans l’accès aux services. Les contours de ces interdictions restent complexes, et les victimes peinent souvent à rassembler les preuves nécessaires pour faire valoir leurs droits.
Comprendre la discrimination : de quoi parle-t-on vraiment ?
La discrimination ne se limite pas à une notion juridique ou à un principe théorique. Elle se manifeste chaque jour, à travers des situations très concrètes : refus lors d’un entretien d’embauche, exclusion d’une formation, mise à l’écart dans une équipe, remarques au bureau qui n’ont rien d’anodin. Le texte de loi qualifie la discrimination de traitement défavorable appliqué à une personne ou à un groupe selon un critère proscrit. L’objectif ? Garantir que chaque citoyen bénéficie des mêmes droits, sans que son origine, sa religion ou son orientation sexuelle ne devienne un motif d’écartement.
Le code pénal et le code du travail couvrent tous les champs : emploi, logement, éducation, accès aux biens et services. Les critères de discrimination sont multiples : origine, sexe, âge, handicap, identité de genre, opinions politiques, engagement syndical, apparence physique, ou encore état de santé. Parfois, il suffit qu’une appartenance (réelle ou supposée) à une ethnie, une nation ou une religion soit perçue pour que la discrimination s’exerce. Le simple soupçon suffit à déclencher le mécanisme, sans que l’auteur ait à prouver son intention.
La discrimination ne se résume pas aux cas flagrants. Même sans volonté manifeste de nuire, un traitement défavorable tombe sous le coup de la loi. Cela peut aller du refus d’accès à un logement à la non-attribution d’un prêt bancaire, en passant par l’exclusion d’un service. Si certains actes sont brutaux, accompagnés de propos humiliants ou de gestes violents, d’autres s’installent dans le quotidien, plus sournoisement. Le phénomène évolue sans cesse, au rythme des débats sur la diversité, l’égalité et la vie professionnelle, et s’observe sous des formes renouvelées.
Les 26 critères interdits par la loi française : tour d’horizon concret
Le législateur a clairement balisé le terrain. La liste des critères de discrimination prohibés ne cesse de s’étoffer, reflet d’une vigilance accrue face à toutes les formes d’exclusion. Aujourd’hui, la France en recense 26, inscrits dans le code pénal et le code du travail. Leur application concerne l’embauche, le déroulement de carrière, mais aussi l’accès au logement, à l’éducation ou aux services publics.
Certains critères font figure de classiques : sexe, âge, origine, religion, état de santé, handicap, appartenance réelle ou supposée à une ethnie ou une nation, couleur de peau, orientation sexuelle, identité de genre. D’autres sont venus s’ajouter, portés par l’évolution des droits et la construction européenne : caractéristiques génétiques, mœurs, activité syndicale, opinions politiques, domicile, famille, grossesse, patronyme.
Voici les critères complémentaires explicitement inscrits dans la loi :
- Apparence physique
- Situation de famille
- Lieu de résidence
- Vulnérabilité liée à une situation économique
- Nom de famille
- Capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français
- Perte d’autonomie
- Particularité génétique
Ce socle juridique offre une vision concrète des discriminations interdites. Une personne ou un groupe peut être visé sur un ou plusieurs de ces fondements, qu’ils soient avérés ou simplement supposés. Cette diversité témoigne de la volonté du droit français : offrir à tous une protection sans faille face à toute forme d’écartement basée sur l’identité, les choix ou la manière de vivre.
Comment reconnaître une situation de discrimination et rassembler des preuves ?
Identifier une discrimination n’a rien d’automatique. Entre ressenti et fait légal, la démarcation peut sembler floue. Pourtant, le droit s’attache au concret : il considère qu’un traitement moins favorable imposé à une personne ou à un groupe, à raison d’un des critères interdits, constitue une discrimination. L’intention de nuire n’entre pas en ligne de compte : seul compte l’impact réel.
Pour repérer une situation de discrimination, interrogez-vous : le refus d’un poste est-il motivé par l’origine ? Une sanction au travail découle-t-elle de la religion affichée ? Un accès refusé à un service public est-il lié à un handicap ? Si la réponse est oui, la situation entre dans le champ de la loi. Il est alors vital de consigner chaque épisode : notez la date, le contexte, les propos tenus, les décisions, l’identité des témoins.
Constituer un dossier solide s’avère déterminant. Un courriel mentionnant explicitement le motif du refus, une attestation de collègue, un enregistrement audio (dans le respect de la légalité) : chaque pièce vient renforcer la crédibilité du dossier. Les juges examinent la cohérence de l’ensemble : la chronologie, la répétition, la concordance des témoignages. Classez les documents, conservez tout échange, et, si besoin, faites-vous accompagner par une association spécialisée ou un avocat. À la victime de démontrer les faits et leur lien avec le critère prohibé ; prouver l’intention discriminatoire n’est pas exigé.
Recours possibles et organismes vers qui se tourner en cas de discrimination
Lorsqu’une discrimination est subie, plusieurs options s’offrent à la personne concernée. L’action civile permet de demander réparation devant le conseil de prud’hommes (pour les affaires liées à l’emploi) ou devant le tribunal judiciaire dans d’autres domaines. L’action pénale cible directement l’auteur : dépôt de plainte, instruction, puis jugement éventuel devant le tribunal correctionnel. Ces démarches peuvent aboutir à des sanctions : amende, prison, compensation financière pour la victime.
Le Défenseur des droits joue un rôle central. Sa saisine est gratuite et accessible en ligne ou via ses délégués partout en France. Cette autorité indépendante instruit chaque dossier, donne des conseils, propose la médiation et peut même intervenir en justice. Pour les affaires de harcèlement sexuel ou de discriminations professionnelles, l’inspection du travail constitue aussi un recours : elle enquête, peut engager une procédure, voire déclencher une enquête formelle.
Ressources et relais utiles
Voici les acteurs à solliciter selon les besoins :
- Associations spécialisées : soutien, conseils, accompagnement juridique.
- Avocats : expertise sur la qualification des faits, stratégie de défense, action en justice.
- Services d’aide aux victimes : écoute, aide psychologique, suivi administratif.
Dans la fonction publique, une sanction disciplinaire peut également être envisagée via la hiérarchie. Au fil de ces démarches, la victime dispose d’un éventail d’outils juridiques et institutionnels pour défendre ses droits. Face à la discrimination, aucun combat n’est trop petit : chaque action compte et fait reculer les frontières de l’exclusion.


